Mexico 2008: Crime et châtiment

Publié le par Christophe

 Mexico, 3e jour
Le slogan de la conférence, Universal Action Now, est décliné sur tous les tons. Et lorsqu'il est question d'accès universel, celui-ci repose sur quatre piliers: prévention, accès aux soins, accès aux traitements, lutte contre les discriminations.

C'est dans ce dernier domaine que les nouvelles ne sont pas très bonnes pour les séropositifs. Le paradoxe est le suivant: jamais le monde ne s'est autant mobilisé, financièrement et politiquement (même si la France n'est pas très brillante en la matière) pour que les malades accèdent aux traitements qui vont leur sauver la vie. Trois millions de séropositifs sont aujourd'hui traités dans le monde. mais dans le même temps, la criminalisation du VIH prend des proportions catastrophiques: il ne s'agit plus de condamner des comportements où la transmission est délibérée, il s'agit parfois de toute une série de mesures pour désigner le séropositif comme seul responsable dans le domaine de la prévention.

Des dizaines de pays, développés ou en développement ont voté des lois qui pénalisent la transmission sexuelle, mais aussi verticale, de la mère à l'enfant. Depuis 2005, treize pays d'Afrique de l'Ouest ont mis en place des lois criminalisant la transmission. Ainsi, une femme séropositive peut être condamnée pour avoir transmis le VIH à son enfant en l'allaitant, même si le pays ne lui fournit pas la nourriture ou l'accès à l'eau potable… Parfois, comme dans certains pays de l'Est de l'Europe, les peines sont durcies si la "victime" décède (même si la loi ne dit pas de quoi et quand).

Aux Etats-Unis, certains Etats obligent les séropositifs à se déclarer et à signer une déclaration sur l'honneur avant de s'engager dans toute relation sexuelle. En Grande-Bretagne, les tabloïds mènent une guerre sans merci aux Africains séropositis, accusés de propager le virus dans la population britannique. Sans surprise, les condamnations pour transmission touchent disproportionnellement les immigrés au Royaume-Uni. Et la liste s'allonge de jour en jour des pays qui, à un niveau ou à un autre, criminalisent la transmission ou le simple fait de ne pas avoir parlé de son statut. Ou mieux comme à Singapour, le fait d'avoir eu des relations sexuelles sans préservatif, même si la personne n'est pas séropo, peut conduire à un procès.

C'est une attaque en règle contre les séropositifs. Comment peut-on accepter que de plus en plus, le séropositif soit désigné comme seul responsable dans la prévention (lire à ce sujet mon post d'hier). Lors du Sommet des personnes vivant avec le VIH, qui s'est tenu juste avant la conférence mondiale, ici dans la ville de Mexico, cette question de la criminalisation a été l'une des thématiques traitées. Si les séropos présents ont reconnu que la transmission volontaire afin de nuire peut être condamnée, celle-ci reste exceptionnelle. L'immense majorité des séropos se protègent et n'ont aucune volonté de nuire à autrui. Ils sont, pour reprendre l'expression du rédacteur en chef de POZ, "des armes de prévention massive".

Publié dans Prévention-sida

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