Franchises médicales: il faut les supprimer

Publié le par Christophe M

Voici le texte que publie conjointement Bruno-Pascal Chevalier, malade du sida en grève des soins, et Christian Lehmann, médecin, à l'origine de la pétition contre les franchises médicales.

NON, MONSIEUR SARKOZY, LES FRANCHISES SUR LES SOINS NE SONT PAS UNE FATALITE !
« A ceux qui ne veulent pas des franchises, qu'ils viennent dire aux Français comment on paye les dépenses supplémentaires! » Nicolas Sarkozy, Sophia-Antipolis, 01/02/2008.

Les franchises sur les soins sont entrées en application le 1er janvier 2008. Malgré l’appel lancé sur Internet dès le mois de Mars 2007, malgré le relai pris par un collectif d’organisations contre les franchises, malgré le travail militant pour expliquer et dénoncer cette mesure, les franchises sur les soins que Nicolas Sarkozy appelait de ses vœux depuis de nombreuses années sont entrées en vigueur après que le principe en ait été voté le 26 octobre à l’Assemblée par les députés UMP, qui choisirent ainsi de « responsabiliser » les cancéreux, les dialysés, les diabétiques et les accidentés du travail.
Tout juste notera t’on que le projet initial de franchise sèche sur les 50 ou 100 premiers euros de dépenses annuelles, qui aurait exclu de tout remboursement 27% des assurés sociaux ( les plus jeunes, les moins malades ) avait été finalement abandonné par Nicolas Sarkozy, au grand dam des assureurs privés* qui attendaient ce signal pour fragiliser encore vis-à-vis de ce public le système solidaire.
Le principe des franchises : une retenue de 50 centimes d’euros sur chaque boîte de médicaments, sur chaque acte infirmier ou de kinésithérapie, sur chaque prise de sang, et une retenue de 2 euros sur chaque transport sanitaire, à concurrence de 50 euros par an, pour l’instant**. ( en supplément des forfaits de 50 euros par an sur les consultations médicales, déjà en vigueur depuis la réforme Douste-Blazy de 2005)
Au prétexte de « responsabiliser » les malades, puis maintenant de financer l’Alzheimer ( en taxant en priorité les patients les plus fragiles et dépendants), le gouvernement a choisi de mettre à mal encore une fois le principe d’assurance-maladie solidaire hérité du pacte de 1945.
Lors de son discours de présentation du plan Alzheimer le 1er février 2008, Nicolas Sarkozy a déclaré : « A ceux qui ne veulent pas des franchises, qu'ils viennent dire aux Français comment on paye les dépenses supplémentaires! », passant ainsi sous silence son plan longuement mûri de « responsabilisation » des malades, et démontrant, s’il en était besoin après sa bévue sur la prise en charge des franchises par les mutuelles complémentaires, sa piètre connaissance du dossier : rappelons qu’à l’automne dernier, en plein débat parlementaire, la Cour des Comptes, par la voix de son président Philippe Seguin, signalait qu’une taxation des stock-options pourrait rapporter 3.5 milliards de recettes supplémentaires par an pour la protection sociale. Nicolas Sarkozy et les parlementaires UMP se sont contentés d’une taxation homéopathique reportée dans quatre ans, et ont préféré aller chercher de la menue monnaie dans la poche des plus malades.
La présidente de France Alzheimer, Arlette Meyrieux, s'est montrée prudente : « On ne sait pas vraiment la part (des franchises, NDLR) qui reviendra à Alzheimer », a-t-elle relevé, mettant en garde contre le risque de « culpabiliser » les personnes atteintes de la maladie.
Chaque jour, effectivement, des patients fragilisés découvrent la réalité des franchises. Contrairement à ce qui a longtemps été claironné par le Ministère de la Santé, les pauvres paient les franchises sur les soins. Le seuil de pauvreté en France est de 817 euros, et seuls sont exemptés ( hormis les femmes enceintes et les enfants), les personnes subsistant avec moins de 610 euros par mois.
Dans ce contexte de détresse et de colère, la grève de soins de Bruno-Pascal Chevalier, travailleur social de 45 ans, atteint du SIDA, représente hélas l’aboutissement inéluctable d’une logique purement financière, d’une lubie présidentielle. Les médias se tournent alors vers lui en masse, s’intéressent à la question des franchises, certains pour la première fois. Et de nombreux Français découvrent aujourd’hui, bien tardivement, la question des franchises sur les soins, qui met en difficulté de nombreuses personnes âgées, invalides, atteintes d'affections de longue durée, mais aussi de plus en plus de personnes et de familles à faibles revenus qui ne peuvent déjà plus faire face aux dépenses de santé et ne se soignent plus qu'en repoussant à plus tard leurs démarches de soins.

L’appel contre la franchise a ainsi engrangé près de 30.000 signatures supplémentaires en quinze jours ( au 02/02/2008 : 113.800 signatures sur le site de l’Appel et 33.000 signatures récoltées sur les marchés, dans les meetings, soit près de 150.000 signatures)

L’appel contre la franchise, ainsi que les initiatives locales et nationales, restent d’actualité. Signez la pétition, faites la signer.

Contrairement à ce qu’affirme Nicolas Sarkozy, les franchises sur les soins ne sont pas une fatalité.
Inutiles économiquement, dangereuses médicalement, injustes moralement, les franchises sur le soins témoignent d’une étrange politique de civilisation, qu’il nous revient de combattre, et de sanctionner.

Christian Lehmann Bruno-Pascal Chevalier
www.appelcontrelafranchise.org www.grevedesoins.fr

Le Collectif National Contre les Franchises et pour l’Accès aux Soins pour Tous appelle à un RASSEMBLEMENT à la clôture des Etats Généraux de l’Organisation des Soins, VENDREDI 8 FEVRIER à 16h00, à PARIS, devant le 67, rue du Faubourg Saint-Martin, m° Château d’Eau ( ligne 4)

* « Sarkozy a tué l’idée de mettre en place une vraie franchise, qui aurait consisté à ne pas prendre en charge du tout les 50 ou 100 premiers euros de dépense, puis à faire varier ce seuil en fonction des besoins de financement de la Sécu. A présent, la grogne est telle que cette mesure ne verra jamais le jour » soupire un courageux expert  anonyme, artisan de ces réformes. L’Expansion, Novembre 2007, Stéphanie Benz.

** Seul le principe des franchises a été voté par les parlementaires. Le montant en a été fixé par décret, et peut être révisé à tout moment par le fait du Prince. Comme le disait Nicolas Sarkozy en Juin 2006 : « Si les dépenses augmentent, et donc le déficit augmente, on pourrait alors augmenter le montant de la franchise. »

Publié dans Politique

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